Depuis plus de sept siècles, la vièle à deux cordes ornée d’une tête de cheval connue sous le nom de morin khuur occupe une place de choix dans la culture de la population nomade de Mongolie. L’importance du morin khuur va bien au-delà de sa fonction d’instrument de musique, car il forme une partie essentielle des rituels, des cérémonies et de la vie quotidienne et a une profonde signification spirituelle.
La conception singulière du morin khuur est étroitement liée au culte du cheval qui a une grande importance. Le corps évidé de l’instrument est affilé à la base et de forme trapézoïdale, attaché à un long manche dépourvu de touches et orné au sommet d’une tête de cheval. La caisse de résonance est recouverte de cuir, tandis que les deux cordes et l’archet sont en crin de cheval. Le son caractéristique de l’instrument est produit en glissant ou en frappant l’archet contre les deux cordes. Malgré la simplicité illusoire de sa conception, le morin khuur possède une étonnante richesse de sons expressifs.
Les techniques d’exécution les plus répandues sont les multiples touchers de la main droite et une variété de doigtés de la main gauche, différentes formes de pizzicato et de « glissements » de la position du son, une technique empruntée à la musique chinoise. L’instrument se joue le plus souvent en solo mais il sert parfois d’accompagnement musical aux danses, au long chant (urtyn duu) et aux légendes mythiques. A ce jour, le répertoire de morin khuur a conservé quelques airs anciens (tatlaga) spécialement destinés à dompter des animaux, vestige d’une époque révolue où la musique était réputée avoir des fonctions magiques.
Les instruments à cordes ornés d’une tête de cheval sont évoqués dans des textes datant de l’Empire mongol des XIIIe et XIVe siècles. Au fil des siècles, les techniques instrumentales se sont transmises oralement du maître à l’élève. La musique du morin khuur a toujours été difficile à transcrire en notation standard du fait de la présence simultanée du ton principal et des harmoniques.
Au cours des quarante dernières années, la plupart des Mongols se sont établis dans des centres urbains et parallèlement à cette migration, le morin khuur a été transplanté des tentes de nomades dans les salles de concert, loin de son cadre historique et spirituel. De plus, l’accordage de l’instrument a été adapté aux impératifs techniques de la représentation scénique, ce qui donne des sons plus aigus et plus puissants qui effacent beaucoup de subtilités du timbre. Heureusement les communautés pastorales survivantes dans le sud de la Mongolie ont préservé l’art du morin khuur avec les rites et les coutumes qui y sont associés.
0 commentaires